Voilà trois réponses passionnantes étayées de chiffres et de faits qui rendent mon propos bien fade. Qui a dit que les tractionnistes n’étaient intéressés qu’à rouler ?
Notre naïveté n’est plus à prouver selon M. PERTIN, ce que je craignais hélas. Dans la notion de pouvoir d’achat, nous ne devons pas oublier le côté affectif, c’est-à-dire le ressenti.
Premier point : la perception des ménages est différente de celle de l’INSEE qui fixe les indices servant à l’établissement de certains prix. Le prix du baril de pétrole a doublé en quelques années. Or comparé à l’inflation, le prix de l’essence a baissé.
Deuxième point, comme le dit M. DERUE, la population supporte de plus en plus mal les profits du CAC 40. Mais en valeur absolue, salaire et pouvoir d’achat moyen ont augmenté. Le salaire moyen net est de 1360 euros. Selon la situation, il sera suffisant ou tout juste. Combien d’étudiants ont leur propre véhicule souvent neuf par rapport à 1968 où l’on récupérait une vieille Traction pour aller à la fac ? En réalité, ceux qui gagnent, gagnent plus que ceux qui perdent, donnant l’illusion d’un positif. Les classes moyennes qui ne bénéficient d’aucun allègement souffrent plus. L’une des réponses selon M. DERUE semble être de contrôler le capitalisme. Mais ce système fondé sur la mise en concurrence encourage la baisse des prix. Aujourd’hui, des packs à 20 euros permettent d’avoir Internet / téléphone et télévision. Que faire ? Ouvrir réellement les marchés européens mais les protéger de l’Asie, comme le dit M. PERTIN ?
Troisième point : les prélèvements automatiques. Certaines dépenses deviennent indolores et l’argent coule comme d’un robinet mal fermé.
Pour compléter mon propos (sur l’usage), ajoutons que la structure de la consommation a évolué. Lorsque vous habitez en banlieue, vos kilomètres augmentent pour rejoindre le centre ville et donc le coût du transport. Il faudra songer à regrouper les lieux de travail et d’habitation si l’on veut réaliser des économies durables de carburant. Les dépenses en communication que j’évoquais (écran plat, portable, etc.) vont parfois de pair avec la sédentarisation et un repli sur la mal bouffe (l’obésité). Paradoxalement les fast-foods, accusés à tort, sont un tel luxe (vu le prix du hamburger !) que les offres de réductions pleuvent dans les boîtes aux lettres pour relancer.
En plus de privilégier la qualité sur la quantité, c’est-à-dire de se méfier de l’illusion de la richesse (où comme je l’écrivais dans une note à diffusion restreinte : on préfèrera bientôt avoir 10 pulls chinois à 5 euros qu’un seul pull en laine irlandaise à 50 euros), AC apporte une 2ème éclairage, celui écologique qui manquait à ma réflexion.
J’ai retenu un article de la revue Terre Sauvage (numéro spécial de novembre 2006). Selon Catherine Larrère, philosophe, depuis Descartes, l’Homme s’est exclu de la nature, celle-ci devenant un monde à conquérir par la Science et la Technique. Puis nous sommes passés au malthusianisme. Dans les années 70, l’idée des grands équilibres a fait son apparition : si on ne touchait à rien, la Nature reprendrait ses droits. Aujourd’hui on a compris que les équilibres n’existaient pas. Le monde change sans cesse avec érosion de la biodiversité. Robert Barbault, écologue, indique que si nous quittions la Terre, celle-ci ne s’en remettrait pas, tellement nous prenons de place ! Aujourd’hui, nous trions et recyclons nos déchets (et sauvons des pièces Traction). Demain il faudra payer pour consommer et payer plus pour détruire. D’où l’urgence de consommer différemment. Il semble que la consommation aille avec le sentiment d’exister, pour soi et pour les autres. Traction vendue = plus de passion ?
Il va falloir évoluer, non pas contre la nature, non pas en la faisant évoluer moins mal (par exemple cultiver intensivement dans un endroit pour en protéger un autre) mais en s’adaptant à elle. Le problème comme le dit Mme Larrère : la France est le pays des droits de l’Homme mais pas de la Nature ! Je crains que la Traction ne soit reléguée au rang d’épiphénomène, voilà pourquoi nous devons nous organiser (vieux combat "Culture contre Nature" ?). Et ce forum attend vos idées en la matière.